Je t’ai vu passer,
Sans rien pour te rattraper
Que le froid des pavés,
Le manteau qui étouffe
La souplesse de la terre.
Je t’ai vu tomber,
Sans filet,
Dans ce cirque antique,
Nos rues qu’arpentent les lions,
Les légions urbaines
De ceux qui ont un pouce.
Catégorie : Je t’ai vu passer
Comme son nom l’indique
Je t’ai vu passer – 5
Je t’ai vu passer,
Tu parlais intime
Aux chalands désœuvrés,
Aux porteurs d’oreillette.
Je t’ai vu passer
Et je connais ta femme,
Tes soucis maritaux aussi,
Tu m’en as parlé.
Je t’ai vu passer – 4
Je t’ai vu passer.
Cette fraction d’attention,
Ce n’est pas grand chose,
Un grain de sable terne
Dans mes pensées cosmiques.
Mais à l’instar de l’éléphant,
Pachyderme vaurien,
Albatros aux courtes ailes,
J’ai peur de la souris
Et de ton sourire entendu.
Je t’ai vu passer – 3
Je t’ai vu passer.
J’en suis sûr.
J’y étais.
En terrasse,
Regardant passer les vies,
Les effleurant,
Comme on caresse des amanites
Des Césars ou phalloïdes,
Sans savoir le venin,
Pour se faire peur,
Pour jouer à l’interdit.
Je t’ai vu passer
Mais je t’ai oublié
Faute de t’avoir touché.
Je t’ai vu passer – 2
Je t’ai vu passer.
Sur la tribune assiégée,
Sous les hourras des fidèles,
Les meilleurs amis de l’Homme
Que la providence a trompé
À trop avoir été pompée.
Chevalier en vrac,
Bretteur en toc,
Tu parlais de ton honneur
Mais même au microscope
Je n’ai rien entendu.
Je t’ai vu passer – 1
Je t’ai vu passer.
Il pleuvait sous le soleil.
Tes pieds nus comme des bottes
Engluées dans l’amertume,
Dans la mer où s’est tue
La clameur des noyés,
L’espoir assassiné.