Bruit blanc

Dans le bruit blanc je gis
Le corps mou
Suant de peur et d’envie
Mon cerveau s’anesthésie
Fourré de glaires nauséabondes
Les crachats en continu
Des bouffons qui font le show
Jour et nuit
Dans l’écran délavé de nos tristes vies.

Dans le bruit blanc sont tapis
Les larbins
Ces valets experts et souriants
Qui détournent en glosant
Le vol libre de nos pensées
Dans les griffes des gourous arrogants
Ces prêtres décorés de pacotilles ridicules
Généraux étoilés et miteux qui jouent du pipeau
Dans les tibias desséchés des enfants échoués.

Broyer

Le fruit étriqué
Acide
Qui a sauté du printemps à l’automne
Sans passer par l’été
Sans murir
Prisonnier jusqu’à la mort
Dans sa peau serrée
Et ses relents grinçants
Broyons-le.

Qui sait si sa fermentation
N’en fera pas l’alcool
Et l’essence de nos révolutions ?

La loyauté

Les pensées empesées
Blanches et emmanchées
Droites et amidonnées
Mâchées Remâchées
M’empoisonnent l’existence
Et j’étouffe de rictus ravalés.

La loyauté qu’on devrait
Avoir à leur égard
Ô le fidèle clébard
Sans même le regard
Du diable et de son avocat
C’est la royauté qui renait.

Il est temps peut-être
De couper les têtes
Des rengaines innées
Évidences assenées
Comme normalité
Et de se mettre enfin à penser.

La peau de tes bras

Un jour j’oublierai le jaune des pistils
La menthe ne me mentira plus
Avalée de travers la pastille
Je sentirai le goût amer de la défaite.

Un jour comme un mardi
Anonyme et minable
Un jour à crever
D’ennui et mourir.

Mais la peau de tes bras
Des années de soleil
Dont je ne sais rien
Juste en face de moi.

Un chant d’oiseau
Caché dans la canopée
J’entends je vibre
Et la vie est jolie.

Mille mètres

Il n’a jamais
Mais pas non plus
Et pourtant tu m’as plu
Sous la pluie tes cheveux
Sur le front de ton anticyclone
Et ma dépression Atlantide
J’habite mille mètres en-dessous
De la surface que tes pieds foulent.

Il n’a jamais
Plus jamais plus
Jamais autant plu
Sur la foule
Sous tes pieds
La foule circule
La fuite s’enroule
Marée basse sous ta plante
Des filets d’eau morte
Dans la houle atlantique
Ils sont noyés les clones
Ils ne sont plus personne
Et coulent par tonnes
Vers mon tonneau des danaïdes
Ma dépression Atlantide
J’habite mille mètres en-dessous
De la surface que tes pieds foulent.

Mea culpa etc.

Coupable
Selon les pointillés
Le chemin incisé dans mon corps par mes nerfs barbelés.

Coupable
D’avoir aimé et détesté
D’avoir fait et de n’avoir pas fait
D’être là et d’être absent
D’avoir dit et de s’être tu.

Coupables la marée et la lune
Coupable la comète décoiffée par le vent
Coupables les parallèles et les sécantes
Le risque pris et la plume qui s’emballe
Le souffle du baiser
La langue et les langues.

Coupable(s)
Alors coupons
Taillons les dissonances
Laissons vivre tous les cris
Les chuchotements de la vie.